• 230/2015 - De petits secrets pas petits


    Mardi - 18 août 2015 - 230/2015 - De petits secrets pas petits

    Je me demande ce que faisait Pascal. Il me manquait énormément et ça me donnait l’impression de ne l’avoir pas vu depuis des siècles. Je voulais le voir, alors j’ai décidé de lui faire une petite surprise. Quant j’ai sonné, j’ai cru qu’un ouragan traversait son appart. C’était discret, mais pas assez pour échapper à mon inconscience. Je n’y ai pas vraiment prêté attention avant de remarquer que Pascal ne voulait pas vraiment me laisser entrer.

    C’est là que j’ai tilté sur le fait qu’il se tenait au milieu du passage et m’expliquait sur un ton d’urgence qu’il était sur le point de partir, qu’il devait retrouver des collègues et qu’il était déjà en retard, et proposait de m’appeler demain. Je crois que c’est les « désolé » à la queue-leu-leu qui ont sonné une sorte d’alarme dans ma tête. C’était louche. J’ai donc filé me renseigner en me branchant sur mon ordi.

    Hum... Jess était là... C'est là que le léger bruit que j'avais entendu sans entendre m'est revenu à l'esprit... Sa femme!

    Pascal rentrait quant j’ai ouvert mon Mac. Jess lui a demandé pourquoi il avait cru nécessaire d’aller planquer sa voiture dans le garage. Pascal lui a répondu qu’il ne voulait pas que je sache qu’elle était là. Bizarre! Pourquoi? Pourquoi vouloir me cacher ça?

    Bon, je peux lui accorder le fait qu’il n’avait pas l’air très heureux qu’elle soit là ou d’être avec elle. C’était même plutôt le contraire. Pascal a vérifié les fenêtres et tournait en rond comme un lion en cage. Un Lion... hahaha, c’est un lion, normal qu’il se comporte comme tel.

    A regarder de plus près, je crois que je comprends ce que Pascal détestait chez elle. Elle est gonflante. Tout le temps sur son dos, elle n’arrête pas de parler. Ciel, ce qu’elle pouvait être chiante. Pascal s’était dirigé vers la cuisine pour se servir un verre de lait avant d’aller s’installer à sa table de travail.

    Jess est venue se coller près de lui. Penché au-dessus de ses épaules, elle regardait ce qu’il faisait. Elle prenait les cartes disposées sur la table dans un ordre précis pour regarder ce qu’il avait noté dessus. En les reposant, elle les mélangeaient sans réfléchir au fait que si Pascal les avait posé là, c’était pour une bonne raison.

    • Qu’est-ce que c’est?
    • Jess ne touche à rien stp.
    • Pourquoi? Je pourrais peut-être t’aider?
    • Non merci. Est-ce que...
    • Tu veux quelque chose à boire?
    • Non merci. Si j’avais soif, j’irai me servir, t’occupes pas.
    • Quelque chose à grignoter alors? Ton frigo est plein à déborder.
    • Jess... J’ai juste besoin d’un peu de tranquillité, j’aimerai que tu me laisses...

    Pascal a poussé un long soupir en voyant son visage s’attrister.

    • J’aimerai juste travailler un peu, et tu sais bien que je déteste...
    • Oui je sais, mais... tu n’es pas obligé de travailler maintenant, non? Ça ne peut pas attendre demain? Je veux dire que vendredi tu seras débarrassé de moi, alors tu ne peux pas être un peu avec moi ce soir? Tu penses réussir à me cacher jusque là?

    Lasser par son insistance, de ne pouvoir faire ce qu’il avait prévu de faire, Pascal a fini par couvrir son plan. Il ne pourra rien faire ce soir. En fait, tant qu’elle sera là. Il s’est préparé un café et a voulu aller sur la terrasse, mais s’est ravisé. Il ne voulait pas s’asseoir et continuait à tournicoter dans son appart.

    Jess a bien remarqué son hésitation à sortir, et ça l’a fait rire. Elle a demandé pourquoi il était si nerveux. Pourquoi est-ce qu’il n’arrivait pas à se poser 2 secondes et qu’ils puissent discuter un peu. Elle lui a demandé pourquoi il tenait tellement à ce que je ne sache pas qu’elle était là. Si son père ne lui avait pas parlé. Bref, elle enchaînait sans fin.

    Pascal était debout au milieu du salon, il ne l’écoutait même pas. Il avait l’air ailleurs. Je me demandait à quoi il pensait, et Jess aussi. Pascal ne semblait pas enclin aux confidences, mais elle a réussi à le convaincre qu’il pouvait lui parler, qu’il fut un temps où ils étaient copains. Jess lui a assuré qu’il pouvait tout lui dire, qu’ils pouvaient parler de tout.

    J’ai alors pensé que c’était privé, que ça les concernait tous deux. Sur le point de fermer mon ordi et partir, mais ses premiers mots ont suspendus mon geste; « Je me demande ce qu’elle fait... ». Elle? Qui elle? Alors j’ai tendu l’oreille et satisfait ma curiosité.

    Je n’ai pas tout de suite compris qu’il parlait de moi. Mon esprit s’était entortillé quant j’ai cru qu’il parlait d’une autre femme. De Manuella peut-être.

    Et il a continué en disant que, parfois il se sentait un peu perdu. Que ce n’était pas toujours facile de la comprendre, que c’était une personne très réservée. Que parfois, il marchait sur des oeufs, ne sachant pas ce qui pourrait la faire tiquer et envoyer valser leur petit monde, parce qu’elle ne parle pas beaucoup de ce qui se passe dans sa tête. Qu’elle était parfois peut-être trop secrète. En tous cas, il ne voulait pas qu'elle s'imagine qu'il se passait quelque chose derrière son dos. Qu'elle le prendrait mal.

    ...Je ne voyais toujours pas de qui il parlait et, les nerfs à vif, j’attendais qu’il prononce un nom... son nom...

    Jess pensait que c'était justement ce genre de mensonge qu'elle risquait de prendre mal. Puis, elle l'a taquiné en lui demandant si elle savait ce qui c'était passé à New York. J'ai avalé de travers. Et qu'est-ce qui s'était passé? Quant il a parlé du fait qu’il ne la voyait pratiquement jamais la semaine, que sa visite inattendue l’avait surpris, j’aurai dû tilté... mais je pense que l’angoisse m’avait obscurci l’esprit.

    Jess lui a demandé pourquoi il ne lui disait pas directement tout ça? C’aurait le mérite de lui faire comprendre qu’il faudrait qu’elle s’ouvre un peu plus.

    Pascal a dit que malgré tout, quant il était avec elle, il se sentait bien. Soulagé. Souvent il se disait qu’il s’inventait trop de scénarios catastrophe. Il avait passé trop de temps à se dire qu’elle finirait par se lasser de lui, que c’était peut-être déjà le cas, parce que parfois, elle était vraiment très distante, voilà pourquoi elle ne voulait pas qu’il rencontre ses proches.

    ...Toujours pas tilté!.. J’étais lente! Pourtant là, j’aurai dû tout de suite faire le lien!

    Pascal a continué en disant que parfois, c'était plus simple de se jeter dans les bras d'une autre, et pendant quelques heures, il ne pensait plus. Il ne pensait pas à moi. Que c’était moins risqué que de venir pleurer sur mon palier, pour lui dire qu’elle lui manquait qu’il voulait plus.

    Pascal regardait ses pieds, et n’a pas vu la grimace sur le visage de Jess. J’ai réalisé que je faisais presque la même. Puis, je crois que ça a commencé à s’éclairer dans mon crâne. Mais, j’avais peur de me tromper, alors j’attendais une confirmation.

    Le fait qu’elle ne cherchait pas à l’empêcher de voir d’autres femmes lui faisait peur parfois. Soit elle avait vraiment confiance en son amour, ou elle en avait rien à foutre. Ou encore, elle attendait qu’il aille trop loin pour le lourder.

    Des gens sont venus récupérer leur voiture et j’ai changé d’écrans gênée. Quant j’ai pu reprendre, ils s’étaient installés vers le bar de la cuisine et Jess lui disait à quel point il avait raison de ne pas me parler de tout ça. Cette fois, elle a prononcé mon nom comme si elle marchait du savon en même temps. Pascal évidemment n’a rien remarqué.

    Jess pensait que ce serait montrer de la faiblesse et que je risquais de le prendre pour une mauviette et dès lors, de m’amuser avec lui comme avec une peluche. C’était préférable que je ne sache pas qu’il passait son temps à se demander ce que je pensais, ce que je faisais, avec qui et tout. Je foutrais de sa gueule.

    Pas du tout... Je trouve ça touchant, et au contraire, je ferais encore plus attention de ne pas le faire douter. Je crois même que je ferais l’effort de lui faire des comptes rendus complet de mes faits et gestes, pour qu’il sache qu’il n’avait rien à craindre. Je me demande si Jess pensait vraiment ce qu’elle disait, ou si c’était pour nous éloigner l’un de l’autre?

    Bon, il ne voulait pas que je sache qu’elle était là? Et bien ok, je ne savais pas. Je n’avais rien vu, ni entendu. L'empêche... Pourquoi Jess était-elle ici? En pleine semaine en plus?

    Je suis rentrée avant de savoir si elle dormirait dans la chambre d’amis ou avec lui. Mais, en même temps, s’il se chiait dans la tête au moins autant que moi, je n’avais pas de soucis à me faire. L’empêche, j’aurai bien voulu le voir ce soir... Je suis quand même surprise qu'il pense autant à moi. Je ne pensais pas faire partie de ses préoccupations!

    Je sais pas, mais, je ne pensais pas qu'il passait autant de temps à se poser autant de questions à mon sujet!


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